Les chaises de Nina

Un murmure de neige, dans le ciel agathois,

Est venu se poser, ce matin, sur les toits.

De timides flocons sur les tuiles surprises

Des maisons endormies que réveille la brise.

Elle n'aura tenu, la mince pellicule,

Qu'un moment éphémère dans le froid qui recule.

C'est janvier moribond qui d'un air facétieux

Nous salue en partant, obscurcissant les cieux.

Ont tiédi les nuages au jour qui s'est levé

C'est la pluie, à présent, qui se plait à laver

La moindre trace blanche qui ose persister,

Retirant, à l'hiver, toute velléité.

Nina Padilha © 26/01/2013

Quand j'habitais là-bas j'étais bien malheureuse.

Entourée de béton, de fumées, de grisaille…

Des immeubles trop hauts aux fenêtres curieuses,

Des portes toujours closes mais des judas canailles.

Et tous ces gens pressés, le visage fermé,

Thésaurisant, avides, d'inutiles hochets

Ou se brûlant les ailes, parfois ivres, camés,

Croyant, faisant cela, la lune décrocher.

Une vie à peu près dont je ne voulais pas.

J'aspirais au repos, plus de simplicité…

Loin du bruit, de la foule… Et j'ai sauté le pas.

Toujours croire en ses rêves, ne jamais désister !

Un beau jour, l'éclaircie et le vent a tourné.

J'ai bouclé ma valise. Mon âme solitaire

A suivi le soleil en Méditerranée

Où je suis arrivée, le cœur en bandoulière.

Ici, j'ai des voisins mais pas de vis-à-vis.

C'est auprès de mes fleurs, entourée de mes chats,

Que s'écoulent mes jours. Tranquillement je vis

Avec la bienveillance de tous mes Orixás.

Nina Padilha © 16/01/2013

Les derniers feux du jour s'éteignent doucement

Imposant le silence sous le firmament.

Et des nuages fous se déchirent de gris

Dans un ciel tourmenté où la lune maigrit.

Léchant les grèves froides de clapotis salés

La Méditerranée, soupire, affalée

Près des rocs de basalte aux noires silhouettes.

Ricanent, en passant, quelques furtives mouettes.

Les ombres de la nuit submergent les maisons.

Dans les heures recluses aux fenêtres fermées,

Crépitent, rougeoyants, les âtres allumés.

De tremblantes étoiles décorent l'horizon.

Frissonnant crépuscule qui, de brumes diaphanes,

Enveloppe mes rimes aux vocables profanes.

Nina Padilha © 21/01/2013

Et la pluie est venue pleurer ma page nue

Que boude cette plume, d'habitude loquace.

Arrivées du ponant, dansent de sombres nues

Dans un ciel larmoyant ou mon ardeur se casse.

Sous la laine doublée, d'indociles frissons

Chagrinent mon humeur de pensées nauséeuses.

Un piètre réconfort me donne la boisson

Chocolatée brûlant ma vigueur paresseuse.

Un sursaut, ce matin, au bord de ma fenêtre

Où un Marin poussif nargue le thermomètre

En soufflant les effluves d'un désert éloigné.

Mais l'hiver entêté bouscule et repousse

Cette douceur fugace, se lance à ses trousses…

Et la mer se hérisse de crêtes indignées.

Nina Padilha © 19/01/2013

Il pleuvait, ce matin, de la neige fondue.

L'opacité du ciel, au plafond bien trop bas,

Le froid beaucoup plus vif, un peu inattendu,

Et l'horizon bouché, presque comme là-bas…

Je l'avais pressenti ! Sous mes yeux ébahis

J'ai soudain vu tomber des flocons par milliers.

L'hiver se fait mordant et je me sens trahie.

Agde, la perle noire, s'est recroquevillée.

C'est vrai que c'est joli de voir la neige franche

Recouvrir les jardins, les palmiers, les maisons…

Mais je ne suis pas gaie de cette valse blanche

Qui m'accule chez moi, en narguant ma raison.

Pas un oiseau, dehors, de rares véhicules

Avancent prudemment, éclairés et au pas.

Je grelotte malgré le manteau, le gros pull.

Je reste bien au chaud et ne sortirai pas.

Nina Padilha © 16/01/2013